mercredi 24 avril 2019

LA MÉLOPÉE DU MOJO


Le plus dur dans la rédaction d’un roman (et je suis en train de 

terminer le 4ème), c’est de le démarrer et de le finir. Un jour, un 

écrivain m’a dit « Lorsqu'on se relit, il faut être son pire 

bourreau ». 

Vincent Laurent










INTERVIEW DE VINCENT LAURENT

Bonjour Vincent Laurent. Merci d’accorder cet interview pour BAZAR BOUQUIN. Alors j’ai lu votre roman, ou plutôt j’ai dévoré votre roman « Le mélopée du mojo » quasiment d’une traite. Il est difficile de le lâcher tant l’histoire nous prend avec elle, nous surprend et nous apprend aussi tant il y a de références. Votre plume est agréable. Nous entrons dans l’histoire et nous sommes aspirés dans un tourbillon qui nous conduit avec le héros droit dans les ténèbres… peut-être en enfer…. qui sait.

En tous les cas votre roman m’a fait pensé à des histoires que je lisais dans le comics pocket « Il est minuit l’heure des sorcières » aux éditions Arédit. Ces histoires étaient terribles, c’était une édition en français de bandes dessinées de DC Comics. J’ai donc retrouvé un peu mon âme d’adolescent en vous lisant et surtout j’ai passé un moment où j’oubliais ma maladie, ce qui n’est pas rien.

Êtes-vous sensible au fait que votre roman puisse ainsi divertir un de vos lecteurs, au point qu’il en oublie pour un moment ses douleurs ?

Non, il est vrai que le processus d’écriture est particulier : on est en général seul avec ses idées et son histoire et on le reste jusqu'à la fin. Lorsque le roman est publié, c’est carrément autre chose qui démarre : je dois parler de ce que j’ai « commis », de la façon dont je l’ai fait. Lorsque j’écris, je pense évidemment aux lecteurs en essayant de leur donner l’histoire la plus agréable possible. Je n’aime pas la sensation de leur faire perdre du temps. Mais savoir qu’ils puissent oublier, comme pour vous, le tracas quotidien et la maladie le temps d’une lecture, ça vaut pour moi tous les prix littéraires du monde…

Pourquoi écrivez-vous Vincent Laurent ?

Au fil du temps, c’est devenu une nécessité. Comme faire du sport ou jouer à la console. J’ai besoin de cette stimulation intellectuelle. Et puis, en fait, j’ai toujours raconté des histoires… Dès l’âge de huit ans, je faisais des BD et m’amusait à écrire des histoires et à surprendre mes premiers lecteurs (mes frères) !


Pour qui écrivez-vous ?

Avant tout pour moi, j’écris les histoires que j’aimerai lire. A présent que je suis père de deux enfants, j’écris aussi pour leur transmettre un bout de moi qu’ils transmettront à leur tour, je l’espère, à leurs propres enfants.


Qu’est-ce qui vous a décidé d’écrire ? Quels sont les auteurs qui vous inspirent le plus ?

J’ai souvent commencé à écrire des histoires que je ne terminais pas. Je m’éparpillais beaucoup. Participer à des concours de nouvelles et être primé à plusieurs reprises m’a poussé sur la voie pour de bon. C’est comme cela que j’ai trouvé la force et le courage d’écrire mon premier roman « Au jeu du chat et de la souris » (qui a été primé à son tour en 2016 par le Lions Club).
Au niveau des romans policiers, j’apprécie énormément Michael Connelly qui est pour moi un monstre de travail et un excellent journaliste. J’aime aussi beaucoup Dennis Lehane ou Andrea Camilleri. En ce qui concerne la créativité, j’ai une grande affection pour Frédéric Dard que j’aurai apprécié rencontrer de son vivant.


Michael Connelly
Crédit: M.J. Kim/AP

C’est votre troisième roman et vous ne vivez pas encore de votre écriture, à ce que j’ai pu comprendre ?

Non, c’est exact. C’est assez difficile d’être publié, c’est encore plus difficile de vivre de son clavier. A moins d’être édité par l’une des dix grosses maisons d’édition qui trustent 95% de la place littéraire, il faut énormément de facteurs, de talents (et de chance parfois) pour faire de son roman un best-seller. Peut-être un jour cela arrivera-t-il. Tant mieux ! Sinon, ce n’est pas grave. Je ne le fais pas pour l’argent.

6. Venons-en à votre roman sans faire de spoiler. Êtes-vous satisfait du rendu final de votre roman, ou pensez-vous encore vous que vous auriez pu changer ceci ou cela ? Ou autrement posé, à quel moment vous dites-vous que ça y est l’écriture du roman est terminée, j’y ai mis toutes les références (et il y en a!) que je voulais ?

Le plus dur dans la rédaction d’un roman (et je suis en train de terminer le 4ème), c’est de le démarrer et de le finir. Un jour, un écrivain m’a dit « Lorsqu’on se relit, il faut être son pire bourreau ». Avec le temps, je suis plus sérieux dans ma relecture. Je pourrais encore modifier certains passages ou en ajouter. Mais à un moment donné, il faut savoir le poser et dire stop, sinon on n’en sort plus.
Je suis assez satisfait du rendu final de la Mélopée du Mojo. Je pense qu’il s’agit de mon roman le plus abouti.

Est-ce que l’actualité comme les gilets jaunes, vous influence lors de l’écriture d’un roman, ou va-t-elle trop vite ?

Je dirais que c’est un ensemble de choses. Les actualités peuvent m’influencer c’est sûr.


A vous lire, vous n’aimez pas trop les talk-show ? Et les films pornos (rire) ?

Ça dépend ! Mais il faut de tout pour faire un monde !

Votre héros Iago ne me parait pas très sympathique, il est même difficile de le plaindre, pourtant il est attachant et on a envie de savoir jusqu'où il va aller, sans forcément être pour lui. Cela nous met dans un drôle d’état : une sorte de « mal à l’aise ». Ne trouvez-vous pas ?

C’était le but ! Lui-même a du mal à se trouver, à cerner son identité dès le départ. Lorsqu'enfin il se voit affubler de pouvoirs et réalise à peu près tout ce qu’il désire, là encore, difficile pour lui de concilier fantasmes et réalités et de comprendre qui il est malgré tout. Je pense qu’Iago est juste un pauvre type, comme nous le sommes tous plus ou moins, qu’il essaie de se démener du mieux possible dans ce monde. Si nous étions capable de réaliser nos moindres désirs, notre côté sombre surgirait à coup sûr. Je suis certain que quel que soit l’individu propriétaire du « mojo », il finirait par s’en servir pour de mauvais desseins. C’est dans la nature humaine !

Nous trouvons beaucoup de références à la musique, à la littérature, la bande dessinée et le cinéma. Pourquoi toutes ces références ? Êtes-vous un geek ?

Non, je ne pense pas. Je m’intéresse à tous les arts. Il y a toujours une musicalité dans mes histoires et des clins d’œil à la musique ou au cinéma. Je pense que je pourrai sortir une bande originale de chacun de mes romans !

9. Vous faites aussi beaucoup allusion à la foi chrétienne (avec une petite erreur, Judas à livré Jésus aux grands prêtres juifs et non aux romains). Est-ce que la cathédrale de Reims en est l’origine ?

Lorsque j’ai décidé d’aborder la frontière entre le bien et le mal, j’en suis rapidement arrivé à la religion. J’ai aimé confronter mon personnage à la foi, à l’Eglise. A un moment donné, Iago se retrouve dans une Eglise et a un dialogue muet avec le Christ qui semble le regarder, lui, l’homme aux pouvoirs divins. A un autre moment, Iago retrouve un personnage assez hostile et qui représente plutôt le mal. J’ai trouvé ces passages intéressants et nécessaires. La cathédrale de Reims, malgré l’inspiration qu’elle me donne, n’y est pour rien.

10. L’autre héroïne de votre roman est la ville de Reims, laquelle est mise à rude épreuve. Cette ville vous donne-t-elle de l’inspiration ?

J’essaie toujours de reconstituer le cadre de mon histoire et en l’occurrence, lorsque je lis un livre, j’aime pouvoir reconnaître la ville dans laquelle les personnages évoluent. Mes précédents romans avaient pour décor Lille et Monaco. Le prochain se déroulera dans le Berlin des années trente… C’est important d’être crédible. Etant rémois d’origine (j’y ai grandi et y ai vécu jusque très tard), la Cité des Sacres m’a évidemment beaucoup inspiré. Et je souhaitais que les lecteurs puissent la reconnaître eux aussi. Ceux qui la connaissent bien auront forcément une autre lecture que le lecteur lambda, reconnaîtront certains endroits, …



Iago travaille comme informaticien, il aime sa famille et il est prêt à tout pour elle. Est-ce que je ne dis pas des bêtises le concernant ? Est-ce qu’il y a un peu de vous en Iago  ou ce personnage est-il entièrement différent de vous ?

C’est tout à fait cela. Sa famille est un peu particulière (c’est rien de le dire), mais elle ressemble probablement beaucoup à une famille classique de province. Je suis un peu comme Iago dans le sens où je suis très porté sur la famille et plutôt fidèle envers les gens que j’aime. Iago est aussi un peu un artiste (il souhaite publier une bande-dessinée). En revanche, en ce qui concerne le reste, je ne me sens pas forcément très proche de lui.

Le diable, plutôt une certaine image qu’on s’en fait, est un acteur important dans votre livre. Il est vraiment terrifiant si, comme moi, on entre dans l’histoire et que les personnages deviennent vivants sous votre plume alerte. Croyez-vous au diable ? Avez-vous eu quelques hésitations de mettre en scène le tentateur ?

Je crois au vice que chacun porte en soi et de ce qu’il peut en faire. Pour le reste, je suis plutôt agnostique. Le personnage dont vous parlez était pour moi nécessaire, car à tout pouvoir il y a un contre-pouvoir. Et lui est là pour remettre les choses à leur place. Des amis proches m’ont confié avoir été particulièrement effrayés ou, du moins, troublés, par l’apparition particulière de ce personnage et dans le cadre dans lequel il survient. Je suis vraiment content de mon effet !...


Une représentation du démon

Comme pour « Il est minuit l’heure des sorcières », nous sommes confrontés à ce qu’il y a au fond de nous-mêmes, c’est-à-dire la concupiscence qui fait que l’on convoite pour toujours vouloir plus, devenir riche puissant et célèbre, quitte à prendre des voies dangereuses. Et nous constatons, tout au long de votre livre, la désillusion que procure le fait de tout avoir sans retenue. Vous considérez-vous comme un moraliste, un donneur de leçons ? Car vous allez quand même plus loin qu’une simple histoire.

C’est une question presque philosophique et je me suis régalé à faire des expériences avec mes personnages. Je ne me sens pas moralisateur, mais j’aime imaginer ce que l’âme humaine peut avoir de meilleur ou de plus sombre au fond d’elle. J’ai la conviction que tout n’est qu’illusion ou désillusion dans la vie, sans forcément pencher dans le côté pessimiste, je suis quelqu'un de très gai. Mais c’est un fait : lorsque l’on atteint un palier, on regarde toujours s’il y en a un autre plus haut à atteindre. Et lorsqu'on l’a atteint, on continue. Il faut alimenter l’illusion, quitte à collectionner les désillusions…


Croyez-vous que la magie existe ?

Non, seule l’illusion de la magie existe.


Y aura-t-il une suite à « la mélopée du mojo ? »

Non, je ne pense pas. Mais le personnage d’Iago peut très bien apparaître brièvement dans un autre roman. Je fais souvent des clins d’œil ou des passerelles entre mes histoires.

Comme le Blog BAZAR BOUQUINS fonctionne au ralenti, je ne vais pas prolonger votre interrogatoire (rire). Cependant vous allez passer aux dernières questions obligatoires.

- Que lisez-vous ces jours comme roman ? « L’arbre des possibles » de Bernard Werber.

- Votre auteur préféré ? Michael Connelly

- Lisez-vous autre chose que des romans ? Pouvez-vous nous dire quoi ?

Je lis aussi pas mal de nouvelles ou des livres d’histoire.

- Qu’écoutez-vous comme musique principalement, celles que vous citez dans votre roman ?

Essentiellement du rock et de la pop, mais je ne suis pas contre un morceau de jazz ou d’autres choses. C’est vrai que la musique que je cite fait souvent partie de ma playlist personnelle !

- Actuellement y a-t-il une chanson qui vous trotte par la tête ?

Je viens de finir « 1984 » de George Orwell. Depuis, j’ai « Karma Police » de Radiohead qui ne me quitte plus !...


Radiohead
crédit: grammy.com

- Qu’aimez-vous ?

Ma famille, mes plus proches amis. Un bon repas (avec du champagne !)

- Qu’est-ce que vous n’aimez pas ?

L’injustice et l’irrespect.

- Voici un liste de noms que j’ai choisi un peu comme cela. Dites-nous ce que vous en pensez en deux mots.

Sebastian : mon frère : un grand artiste en devenir !

Stephen King > C’est le roi. Comme quoi le produit porte parfois la bonne étiquette !

Sire Cedric >> Talentueux, mais ce n’est pas trop ma came.

Bram Stocker >> Un grand monsieur qui a su créer un monstre littéraire !

Mary Shelley >> Une grande dame qui a su créer un monstre littéraire !

Stan Lee >> Une collection impressionnante de best-sellers !

Jack Kirby >> Une imagination débordante.

 Frank Zappa >> Je ne le connais pas bien.

Quentin Tarentino >> Un génie, tout simplement.

Jean Cocteau >> Un visionnaire.

Mylène Farmer >> On a besoin d’amour !

Question subsidiaire : Aimez-vous le chocolat ? 

 A petite dose !

Voilà cher Vincent Laurent, vous êtes libre de conclure cette interview limité, veuillez m’en excuser. Vous pouvez écrire tout ce que vous voulez. Il n’y a pas de censure chez MANA BAZAR.

Merci Patric de votre intérêt pour mon travail. La littérature, et les petits auteurs comme moi, ont besoin de personnes comme vous !





Ichigo Samuru


1 commentaire:

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